Le Premier ministre,
Sur le rapport de la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement,
Vu le code rural, et notamment le chapitre II du titre IV du livre II relatif à la protection de la nature ;
Vu le décret no 79-413 du 25 mai 1979 relatif à l'organisation des actions de l'Etat en mer au large des départements et territoires d'outre-mer et de la collectivité territoriale de Mayotte ;
Vu le décret no 97-1204 du 19 décembre 1997 pris pour l'application à la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement du 1o de l'article 2 du décret no 97-34 du 15 janvier 1997 relatif à la déconcentration des décisions administratives individuelles ;
Vu les pièces afférentes à la procédure de consultation simplifiée relative au projet de classement en réserve naturelle des îles de la Petite Terre ;
Vu la délibération du conseil municipal de la commune de La Désirade en date du 30 août 1996 ;
Vu l'avis de la commission départementale des sites, perspectives et paysages siégeant en formation de protection de la nature en date du 9 janvier 1997 ;
Vu l'avis du préfet de la région Martinique, délégué du Gouvernement pour la coordination de l'action de l'Etat en mer en date du 30 août 1996 ;
Vu le rapport du préfet du département de la Guadeloupe en date du 22 mai 1997 ;
Vu l'avis du Conseil national de la protection de la nature en date du 23 octobre 1997 ;
Vu les accords et avis des ministres intéressés,
Décrète :
Chapitre Ier
Création et délimitation
de la réserve naturelle des îles de la Petite Terre
Art. 1er. - Sont classées en réserve naturelle, sous la dénomination « réserve naturelle des îles de la Petite Terre », département de la Guadeloupe, les îles de Terre de Haut et de Terre de Bas de la commune de La Désirade (parcelles cadastrales nos 1, 2, 3, 4, 5 et 6 de la section AP), ainsi que l'espace maritime autour de ces îles délimité par des lignes droite reliant cinq points de coordonnées : B 1 (61o 08,23' W, 16o 10,68' N), B 2 (61o 05,70' W, 16o 11,50 ' N), B 3 (61o 05,57' W, 16o 11,00' N), B 4 (61o 06,25' W, 16o 09,94' N), B 5 (61o 07,60' W, 16o 09,42' N) situés sur l'isobathe des 10 mètres, matérialisés par 5 bouées, soit une superficie totale d'environ 990 hectares, dont 148,6 hectares pour la partie terrestre.
La délimitation de la réserve naturelle est reportée sur la carte du service hydrographique et océanographique de la marine au 1/60 000 et les parcelles mentionnées ci-dessus figurent sur le plan cadastral de la commune de La Désirade, section AP, au 1/5 000. Cette carte et ce plan sont annexés au présent décret et peuvent être consultés à la préfecture de la Guadeloupe.
Chapitre II
Gestion de la réserve naturelle
Art. 2. - Le préfet de la Guadeloupe, ci-après dénommé « le préfet », est responsable de la gestion de la réserve naturelle. Il doit obtenir l'accord du délégué du Gouvernement pour l'action de l'Etat en mer pour les décisions qui relèvent du domaine de compétence de ce dernier.
Il est créé un comité consultatif de la réserve naturelle, présidé par le préfet ou son représentant, auquel participe le délégué du Gouvernement pour la coordination de l'action de l'Etat en mer ou son représentant.
La composition de ce comité est fixée par arrêté du préfet. Il comprend de manière équilibrée :
- des représentants de collectivités territoriales concernées, de propriétaires et d'usagers ;
- des représentants d'administrations et d'établissements publics concernés ;
- des personnalités scientifiques qualifiées et des représentants d'associations de protection de la nature.
Les membres du comité sont nommés pour une durée de trois ans. Leur mandat peut être renouvelé. Les membres du comité décédés ou démissionnaires et ceux qui, en cours de mandat, cessent d'exercer les fonctions en raison dequelles ils ont été désignés doivent être remplacés. Dans ce cas, le mandat des nouveaux membres expire à la date à laquelle aurait normalement pris fin celui de leurs prédécesseurs.
Le comité consultatif se réunit au moins une fois par an sur convocation de son président. Il peut déléguer l'examen d'une question particulière à une formation restreinte.
Art. 3. - Le comité consultatif donne son avis sur le fonctionnement de la réserve, sur sa gestion et sur les conditions d'application des mesures prévues au présent décret.
Il se prononce sur le plan de gestion de la réserve.
Il peut faire procéder à des études scientifiques et recueillir tout avis en vue d'assurer la conservation, la protection et l'amélioration du milieu naturel de la réserve.
Art. 4. - Le préfet, après avoir demandé l'avis de la commune de La Désirade et celui du comité consultatif, confie par voie de convention la gestion de la réserve naturelle à un établissement public, à une collectivité locale, à une association régie par la loi du 1er juillet 1901 ou à une fondation.
Pour assurer la conservation du patrimoine naturel et de la biodiversité de la réserve, le gestionnaire conçoit et met en oeuvre un plan de gestion écologique de la réserve, qui s'appuie sur une évaluation scientifique de ce patrimoine et de son évolution.
Le premier plan de gestion est soumis par le préfet après avis du comité consultatif à l'agrément du ministre chargé de la protection de la nature. Le plan de gestion est agréé par le ministre après avis du Conseil national de la protection de la nature. Le préfet veille à sa mise en oeuvre par le gestionnaire. Les plans de gestion suivants sont approuvés après avis du comité consultatif par le préfet, sauf s'il estime opportun de solliciter à nouveau l'agrément du ministre.
Chapitre III
Réglementation de la réserve naturelle
Art. 5. - Il est interdit d'introduire à l'intérieur de la réserve des animaux quel que soit leur état de développement, sauf autorisation délivrée par le préfet, après consultation du Conseil national de la protection de la nature et à l'exception de ceux qui participent à des missions de police, de recherche ou de sauvetage.
Il est interdit, sous réserve de l'exercice de la pêche dans les conditions fixées par l'article 9 du présent décret, et sous réserve d'autorisations délivrées à des fins scientifiques ou d'entretien de la réserve par le préfet après avis du comité consultatif :
- de porter atteinte aux animaux d'espèce non domestique ainsi qu'à leurs oeufs, couvées, portées ou nids, ou de les emporter hors de la réserve ;
- de troubler ou de déranger les animaux.
Art. 6. - Il est interdit :
1o D'introduire dans la réserve tous végétaux sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation délivrée par le préfet après consultation du Conseil national de la protection de la nature ;
2o Sous réserve d'autorisations délivrées à des fins scientifiques ou d'entretien de la réserve par le préfet, après avis du comité consultatif, de porter atteinte aux végétaux ou de les emporter en dehors de la réserve.
Art. 7. - Le préfet peut prendre, après avis du comité consultatif, toutes mesures en vue d'assurer la conservation d'espèces animales ou végétales ou la limitation d'animaux ou de végétaux surabondants dans la réserve.
Art. 8. - L'exercice de la chasse est interdit sur toute l'étendue de la réserve.
Art. 9. - La pêche à la ligne, au filet, à la nasse, la chasse sous-marine au fusil ou tout autre instrument similaire, le ramassage d'animaux vivants ou morts sont interdits dans l'espace maritime de la réserve. Toutefois, la pêche des appâts à l'épervier, d'une part, et l'usage des types de sennes ciblant des espèces pélagiques de petite taille sans contact du filet avec le fond, d'autre part, peuvent être autorisés dans des conditions déterminées par arrêté cosigné par le préfet et par le délégué du Gouvernement pour la coordination de l'action de l'Etat en mer, après avis du comité consultatif.
Art. 10. - Les activités agricoles, forestières ou pastorales sont interdites.
Art. 11. - Il est interdit :
1o D'abandonner ou de déposer tout produit de nature à nuire à la qualité de l'eau, de l'air, du sol ou du site ou à l'intégrité de la faune et de la flore ;
2o D'abandonner ou de déposer en dehors des lieux spécialement prévus à cet effet des détritus de quelque nature que ce soit ;
3o De troubler la tranquillité des lieux par toute perturbation sonore, sous réserve de l'exercice des activités autorisées par le présent décret ;
4o De porter atteinte au milieu naturel en faisant du feu en dehors des installations prévues à cet effet ou en faisant des inscriptions autres que celles nécessaires à l'information du public ou à la gestion de la réserve ;
5o De pratiquer le ski nautique ou le scooter des mers sur toute l'étendue de la réserve.
Art. 12. - Tous travaux publics ou privés sont interdits, sous réserve des dispositions de l'article L. 242-9 du code rural. Toutefois peuvent être autorisés par le préfet et le délégué du Gouvernement pour la coordination de l'action de l'Etat en mer, dans leurs domaines de compétences respectifs, les travaux nécessités par l'entretien de la réserve, après avis du comité consultatif.
Art. 13. - Toute activité de recherche ou d'exploitation minière est interdite dans la réserve.
Art. 14. - La collecte de minéraux, fossiles et vestiges archéologiques est interdite, sauf autorisation délivrée à des fins scientifiques par le préfet, après avis du comité consultatif et selon la réglementation en vigueur pour les fouilles archéologiques.
Art. 15. - Toute activité industrielle ou commerciale est interdite. Seules peuvent être autorisées par le préfet, après avis du comité consultatif, les activités commerciales liées à la gestion et à l'animation de la réserve naturelle et compatibles avec les objectifs du plan de gestion.
Art. 16. - L'utilisation à des fins publicitaires de toute expression évoquant directement ou indirectement la réserve est soumise à autorisation délivrée par le préfet, après avis du comité consultatif.
Les activités professionnelles touchant à la photographie, la cinématographie, l'enregistrement du son, la radiophonie et la télévision peuvent être réglementées par le préfet, après avis du comité consultatif.
Art. 17. - 1o Sur la partie marine de la réserve, la circulation des personnes ainsi que la navigation et le mouillage des engins et des embarcations sont réglementés par arrêté conjoint du préfet et du délégué du Gouvernement pour la coordination de l'action de l'Etat en mer, après avis du comité consultatif ;
2o Les bateaux en stationnement dans le lagon situé entre les deux îles de Terre de Haut et de Terre de Bas doivent impérativement ancrer dans les zones réservées au mouillage définies par arrêté cosigné par le préfet et le délégué du Gouvernement pour la coordination de l'action de l'Etat en mer, ou s'amarrer aux installations prévues à cet effet ;
3o Le stationnement est interdit sur les plages en dehors des emplacements réservés à cet effet ;
4o Les dispositions des alinéas 2 et 3 ne s'appliquent pas aux embarcations participant à un service public ou à la gestion de la réserve naturelle.
Art. 18. - La circulation des véhicules à moteur est interdite sur les îles.
Toutefois, cette interdiction n'est pas applicable :
1o Aux véhicules utilisés pour l'entretien et la surveillance de la réserve ;
2o A ceux des services publics ;
3o A ceux utilisés lors d'opération de police, de secours ou de sauvetage ;
4o A ceux dont l'usage est autorisé par le préfet.
Art. 19. - La circulation des personnes peut être réglementée par le préfet, après avis du comité consultatif, sur les parties terrestres de la réserve.
Art. 20. - L'exercice de la plongée sous-marine est réglementé par le préfet et le délégué du Gouvernement pour la coordination de l'action de l'Etat en mer, après avis du comité consultatif.
Art. 21. - Il est interdit aux aéronefs motopropulsés de survoler la réserve à une hauteur du sol inférieure à 300 mètres. Cette disposition n'est pas applicable aux aéronefs d'Etat en nécessité de service, ni aux opérations de police, de sauvetage ou de gestion de la réserve naturelle.
Art. 22. - Toute forme de campement sous une tente ou dans tout autre abri est interdite. Toutefois, le préfet peut autoriser le bivouac, après avis du comité consultatif.
Art. 23. - Les dispositions du présent décret ne peuvent avoir pour effet de limiter les activités militaires, et particulièrement la circulation et le stationnement des unités de la marine nationale, la sécurité des moyens militaires de défense ainsi que les activités liées à l'exécution de la politique militaire de défense.
Art. 24. - La ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement est chargée de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 3 septembre 1998.